Rapport 2014 du Groupe de Suivi Amiante du Sénat: l’essentiel…

Retour sur les travaux du comité de suivi amiante du sénat

 


[Reportage] Retour sur les travaux du comité de… par Senat

Le groupe écologiste du Sénat avait demandé et obtenu en février 2013 la création d’un comité de suivi sur l’amiante au sein de la commission des affaires sociales du Sénat.

J’ai eu la responsabilité de présider ce comité
comprenant huit membres de tous les groupes politiques représentés au Sénat.

Nous avons choisi de travailler en deux temps: jusqu’en décembre 2013, un point a été fait sur la problématique de l’indemnisation des victimes, et de janvier à juin 2014 nous nous sommes concentré-e-s sur la question épineuse du désamiantage.

Ce sont en tout plus de 36 organismes qui ont été rencontrés (associations de victimes, professionnels du diagnostique et du désamiantage, médecins, syndicats, directions des nombreux ministères concernés, architectes, experts, fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante, et nombreuses branches professionnelles du bâtiment – PME, grosses entreprises et artisans), au cours de 42 auditions et de 6 tables rondes. Le comité s’est également déplacé sur le campus de Jussieu pour constater sur le terrain les difficultés techniques considérables que pose le désamiantage.

18 mois plus tard, nous avons remis officiellement les conclusions de nos travaux, dans un rapport qui a été adopté cette semaine à l’unanimité par la commission des affaires sociales.

Ce rapport (en pièce jointe) fait premièrement le bilan de la mise en œuvre des préconisations d’une précédente mission sénatoriale de 2005 sur le sujet. Beaucoup ont été appliquées par les pouvoirs publiques, mais 7 propositions concernant l’indemnisation et son financement sont restées lettre morte.

Concernant le désamiantage ensuite, le volet réglementaire est globalement satisfaisant (deux décrets de 2011 et 2012 l’ont considérablement renforcé) mais c’est la mise en oeuvre qui est dramatiquement défaillante.

Selon les chiffres officiels, l’amiante aura fait 100 000 morts en 2050.  Si des mesures rapides ne sont pas prises par les pouvoirs publics, le désamiantage sera fait dans des conditions catastrophiques et c’est une seconde épidémie qui pourrait se développer, touchant notamment les salariés du bâtiment (ils sont un million) dont  les petits artisans,  les salariés des entreprises de désamiantage, mais aussi les riverains. Tous les bâtiments publics et privés construits avant 1997 (date de l’interdiction en France de l’amiante) contiennent potentiellement de l’amiante (l’ANDEVA estime à 20 millions de tonnes les matériaux contenant de l’amiante encore en place).

Le comité de suivi a fait 4 séries de propositions:

  1. Il faut absolument mettre en place un pilotage national interministériel afin d’élaborer une stratégie nationale avec un calendrier et des priorités (sans doute sur plusieurs décennies). Nous demandons donc la création d’une structure de coordination interministérielle rattachée au Premier ministre. Il faut également instituer une mission d’appui pour les maîtres d’ouvrage publics, flécher des crédits vers la recherche et le développement et créer une plateforme internet unique sur le risque amiante à destination à la fois du grand public et des professionnels.
  2. Le repérage de l’amiante est aujourd’hui assez défaillant. C’est un maillon faible. Des mesures sont proposées, par exemple pour former de façon rigoureuse les diagnostiqueurs, et pour informer l’ensemble des professions du bâtiment des risques. Il faut également créer une base de donnée internet avec tous les DTA (diagnostics techniques amiante) et renforcer plus généralement la coordination et la cartographie
  3. Pour renforcer la sécurité des travailleurs exposés à l’amiante, il est proposé par exemple de demander aux organisations professionnelles de sensibiliser leurs adhérents à ce risque, de renforcer le rôle des CHSCT et de l’inspection du travail et d’élargir la possibilité de « l’arrêt de chantier amiante »
  4. Pour mieux protéger la population en général enfin, plusieurs propositions: abaisser le seuil d’amiante dans l’air déclenchant les travaux de désamiantage, mieux informer les particuliers sur la gestion des déchets, aider les employeurs publics à contacter les agents susceptibles d’avoir été exposés à l’amiante et renforcer les effectifs de l’InvS (Institut national de veille sanitaire).

En conclusion, l’amiante n’est malheureusement pas un problème du passé: bientôt 20 après son interdiction officielle – bien tardive -, il est urgent d’alerter sur ce défi du désamiantage.

J’ai d’ailleurs prévu d’envoyer ce rapport au Premier ministre dans les plus brefs délais, et de lui demander un rendez-vous rapidement pour lui communiquer ces propositions et insister sur le fait qu’il serait irresponsable de ne rien faire.

Nous sommes à votre disposition pour toute précision ou contact utile sur le sujet.

En attendant, vous trouverez diverses ressources sur le site du Sénat:

Bien cordialement

Aline Archimbaud